Confidences d’une spécialiste du sommeil qui ne cherche pas à faire dormir les enfants

Education, Parentalité, Sommeil

Cette semaine, je vous partage une réflexion très personnelle et certainement  très surprenante pour beaucoup.

Le sommeil, c’est mon métier, ma « spécialité ». J’accompagne depuis de nombreuses années des familles autour de cette grande question. La finalité de mes consultations ? Permettre à l’enfant (et à ses parents) de (re)trouver un sommeil serein. En tout cas, c’est ce pourquoi les parents me consultent.

Il y a peu, j’ai vécu une importante remise en question professionnelle. La question qui me taraudait était : peut-on réellement faire dormir un enfant ?

La réponse me paraît aujourd’hui évidente, au point d’être persuadée que la finalité des consultations se trouve ailleurs que dans un enfant qui dort. Je vous raconte…

J’adore mon métier

Je me sens chanceuse d’être choisie par tant de familles pour les accompagner sur un bout de chemin. Chaque consultation est une rencontre. Et je suis toujours très touchée par la confiance que m’offrent les parents. J’entre à pas de velours dans l’intimité des familles.

Les parents me partagent des bribes de leurs histoires, me racontent avec des yeux brillants la rencontre avec leur enfant, les joies, l’émotion, la fierté. Mais également les doutes, les peurs, les difficultés de leurs couples, le long tunnel de l’épuisement, l’usure, la colère face à cet enfant qui les prive d’un sommeil si précieux. Je réalise le courage et l’humilité de ces parents en recherche d’une aide. Et je fais tout mon possible pour prendre soin de chacun.  

Lorsqu’un enfant d’1 an se réveille toutes les heures la nuit, il est légitime de rechercher de l’aide. Lorsqu’un bébé de 3 mois hurle du matin au soir, il est humain de vouloir que ces cris cessent. Lorsqu’un enfant de 2 ans reste 1.5 heure en éveil la nuit, il est cohérent de vouloir dormir…

Durant les consultations, nous échangeons sur bon nombre d’actions à mettre en place à la maison pour apaiser l’enfant. Et cela a des effets bénéfiques rapidement le plus souvent.

Un enfant reste un enfant…

Il y aura toujours des poussées dentaires, des périodes de développement, des rhumes et des otites. Certains enfants ne feront jamais des nuits de 12h car ce n’est pas leur nature. D’autres auront besoin de manger la nuit jusqu’à 12 mois car ils peinent à prendre les quantités « classiques » la journée.

Il est aussi de mon devoir de ne pas forcer le sommeil d’un enfant. Car un enfant n’est pas un tamagotchi. On ne fait pas dormir un enfant sur commande. Et il est absolument dangereux pour les familles de lire sur certains sites « résultats garantis en 15 jours seulement ». Mais je vous ai déjà partagé ma colère à ce sujet il y a peu.

Il y a des situations dans la vie de parents qui demandent de la patience, de l’énergie, de la persévérance et beaucoup de résilience .Il est primordial de le rappeler aux parents qui souffrent le plus souvent des conseils d’un entourage jugeant. Le plus important dans tout cela est de prendre soin des parents, de valoriser leurs intuitions, de bichonner leurs émotions, d’écouter leurs remises en questions et leurs doutes. Leur dire que ce sont de bons parents, qu’ils vont y arriver, qu’ils n’ont rien fait de mal et que ce n’est pas de leur faute.

Mon approche a tellement évolué depuis mes débuts

Cela fait 5 ans que je suis spécialisée dans le sommeil de l’enfant. Avant, devant l’urgence d’un épuisement parental, je cherchais à stabiliser en premier lieu le sommeil de l’enfant. Parce que les parents avaient besoin de mieux dormir. Parce que le mauvais sommeil de leur enfant était la cause de leur épuisement.

Aujourd’hui, je suis persuadée que ce n’était pas la bonne approche. Plus j’avance dans ce métier, plus je réalise que la première urgence est de prendre soin des parents.

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L’épuisement parental est une urgence vitale

Ayant travaillé en réanimation pédiatrique, j’ai gardé quelques automatismes. Stabiliser les constantes vitales pour traiter la cause. Accompagner les parents à sortir de leur épuisement pour qu’ils puissent ensuite accompagner leur enfant vers de nouvelles habitudes de sommeil. Et croyez-moi ou non, lorsque nous trouvons la bonne voie d’abord, l’enfant se met très rapidement à mieux dormir. C’est magique, il faut l’avouer, même si j’ai du mal avec ce terme.

En consultation, nous ne faisons pas dormir les enfants. Nous leur permettons de trouver assez de confiance et de sécurité pour qu’ils trouvent eux-mêmes leurs compétences. Comme on ne fait pas marcher un enfant, on ne le fait pas dormir. L’enfant est une personne à part entière. Cela paraît logique dit comme cela mais ce n’est pas toujours si évident.

Nous sommes dans une société de résultats. Et, c’est mon humble avis, nous recherchons encore trop à maîtriser plutôt qu’à accepter. Arrêtons de vouloir faire dormir les enfants à tout prix. D’ailleurs, les adultes font-ils leurs nuits ? Ne demandons-nous pas plus à nos enfants que nous ne sommes capables nous-mêmes ?

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